Arrivée à la frontière du Argentine/Paraguay, la nuit est tombée. Une dizaine de camions stationnent ici dans la poussière, ils ne reprendront la route que demain. A pied je traverse le vieux pont métallique à peine éclairé et m'approche des guichets de la douane.

 

-Vous pouvez... (langage des signes : « tamponner mon passeport ») … pour aller en Uruguay ?

 

Il fronce les sourcils. Silence.

 

-Euh non, pas l'Uruguay, le Paraguay ! Je veux aller au Paraguay !

 

Ca y est je m’emmêle dans les pays, il faut dire qu 'aujourd’hui j'étais en Argentine et hier en Uruguay. Certes le Paraguay, ça finit par GUAY, c'est un petit pays plat en Amérique du Sud.. mais à part ça, rien à voir avec l'Uruguay.

 

Ici la chaleur étouffe, le soleil brûle, le jeans colle.

La plupart des paraguayens sont indigènes alors difficile de passer inaperçue. A Asunción, je me fais alpaguer par les vendeurs de rue. Il y en a beaucoup. Des mendiants aussi. Et un bidonville à cinq mètres de la cathédrale, en contrebas. De nombreuses maisons et magasins du centre sont abandonnés.

 

Un vieillard m'explique que « ce n'était pas comme ça avant », que les gens ont fait faillite à cause de la crise financière il y a dix ans. Selon la fille de l'auberge, le centre-ville colonial a été délaissé car les gens préfèrent vivre dans des maisons avec jardins, donc en banlieue. Et aussi c'est moins cher. Du coup, les commerçants seraient aussi partis en banlieue.

 

Le samedi à 16 heures les boutiques ferment jusqu'au lundi. Il n'y a même pas dix bars pour sortir le soir. Seul le palais présidentiel bordé d'un grand terrain vague rappelle qu’Asunción est une capitale...

Et puis l'armée aussi, qui encercle la cathédrale car le président va à la messe aujourd'hui !

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Je tends le pouce et fuis cette capitale.

En voiture mes conducteurs me font goûter la boisson nationale, le terere (succulent maté froid sucré à la menthe). Au bord de la route, une famille frappe la pierre au marteau. Ils sont assis dans la poussière blanche, transpirant, à côté d'un tas d'ardoises taillées.

 

J'arrive chez Jennifer et son père, Carlos, italien, qui adore le Paraguay car ça ressemble à l'Italie. Je passe quelques jours à la campagne dans leur maison. Jennifer m'explique que le Paraguay est l'un des pays les plus déforestés d'Amérique du Sud.

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Dans la région du Chaco, au nord du pays, 1000 hectares de forêts disparaissent chaque jour, soit 360 000 hectares par an. Les images satellites montrent clairement un pays vert devenu gris.

D'ailleurs, sur la route, je vois peu d'arbres, surtout des broussailles à perte de vue.

 

Moment insolite à discuter en allemand et à boire des bières avec mon conducteur, Hans, au milieu de ce désert du Chaco. Il est paraguayen mais mennonite. C'est un courant protestant d'origine suisse. De nombreux mennonites d'Allemagne et de Russie ont migré ici au XXème siècle. Les plus religieux refusent tout mode de vie moderne : électricité, voitures, téléphone, internet etc. Niveau look c'est plutôt « petite maison dans la prairie »  : salopette et casquettes pour les hommes, robes longues et tresses pour les femmes. L'allemand est la langue locale.

 

Hans, contrairement à son grand-père germanique, n'est pas pratiquant.

Il me dépose à Patria, un hameau de cinq maisons.

Un ivrogne se passionne pour mon voyage en stop. Puis les autres habitants.

Je leurs montre ma carte du monde, mes photos. Aucune voiture ne passe.

Trois heures plus tard... Un chilien s'arrête pour me demander son chemin. Je continue mon tour du monde en auto-stop vers la Bolivie.