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LE MONDE  SUR LE POUCE

Le tour du monde 100% en stop et en images de Florence Renault

IRAN

du 29 Octobre au 17 Novembre 2018

Récit De Voyage

Après avoir traversé en auto-stop l'Ouzbékistan et le Turkménistan, des pays très traditionalistes, j'arrive à Mashaad, la ville la plus religieuse et conservatrice d'Iran. L'ambiance me met carrément mal à l'aise. Je savais que les chemises longues et les foulards étaient de rigueur. Mais j'ignorais pas que la plupart portaient le tchador (voile intégrale). Je suis donc été choquée de voir toutes ses formes noires se glisser dans les rues. Ça me semble triste et injuste pour elles et aussi pour moi qui porte un simple foulard : ça tombe tout le temps, ça empêche de retirer son pull, ça tient chaud, bref c'est chiant.

Il n'y a que dans la chaleur des maisons que j'oublie cette atmosphère oppressante pour passer de beaux moments avec mes hôtes. Chaque nuit, je suis hébergée en couchsurfing ou par un conducteur. La jeunesse iranienne rêve de liberté et de vie à l'étranger. Ici c'est la crise économique, la monnaie n'arrête pas de chuter, alors ils veulent savoir les niveaux de salaires. Ils ont aussi beaucoup de questions sur les relations hommes/femmes : "As-tu déjà eu des petits copains?", "es-tu déjà allée à des fêtes?", "Ce garçon me plaît, qu'est-ce que je dois faire?" Des questions mignonnes si elles étaient posées par un ado de quatorze ans... mais assez tristes à entendre de la bouche de trentenaires... Il me semble que ce peuple est profondément frustré et malade de vivre dans une société cloisonnée entre hommes et femmes : écoles, transports, activités. Rien n'est mixte, à part l'université... et la rue... Alors c'est habituel de se faire suivre par des mecs, plusieurs fois par jour. Mon doigt d'honneur s'avère assez dissuasif et fait rire quelques grands mères au passage. On m'apprend plus tard que c'est un signe utilisé uniquement par les hommes et au summum de la vulgarité.

Je me fais accoster toutes les vingt secondes dans la rue "hello", "how are you ?", "where are you from"...des mots gentils et accueillants certes, mais épuisants au bout de trois heures de ballade. Alors je rentre à la maison de mes hôtes qui ce soir m'offrent à manger. Tu reprends un peu de riz ? Non ! Tu es sûr ? Oui. Et puis après avoir refusé dix fois, une louche de riz s'écrase dans mon assiette. La coutume iranienne consiste à insister en permanence mais aussi à refusant même lorsqu'on veut quelques chose. Ça peut sembler amusant mais, pour une néophyte comme moi, c'est épuisant mentalement d'exprimer son refus dix fois pour, au final, ne pas être écoutée. En France, on appellerait ça de l'infantilisation, ou du harcèlement moral. Mais en Iran, ça s'appelle la politesse !

Lors de mon dernier jour en Iran, mes conducteurs ont tellement insisté pour que je vienne dormir chez eux, que malgré mes premiers refus, j'ai fini par accepter un détour de 200km !

A part cette atmosphère générale pesante, l'Iran n'est pas un pays dangereux pour les voyageurs. Les Iraniens sont "too much" pour moi, mais sont des gens adorables et serviables. Je ne suis jamais sentie en danger, même pas lorsque je me suis fait suivre par des hommes dans la rue car je savais que "c'était culturel".

L'Iran est le pays "number 1" pour l'auto-stop... C'est très facile et ça en dit long sur l'altruisme et la confiance de la population. Aux langues vénéneuses, je réponds que non, ce n'est pas juste car je suis une fille aux cheveux blonds. J'ai eu des retours d'expériences d'hommes aux cheveux noirs qui, eux-aussi, n'attendaient pas plus d'une minute pour une voiture. Par contre, j'ai refusé pas mal de conducteurs aux regards pervers. Et je n'ai eu qu'un incident en trois semaines (ce qui est une fréquence habituelle).

Je garde un excellent souvenir de ma traversée du désert avec un camionneur et sa femme doctorante en philosophie. Les Iraniens sont coupés de la réalité du monde, mais sont par ailleurs très éduqués. Ils collectent les masters, les doctorats. C'est le premier pays où mes conducteurs intéressent à mon niveau d'études !

 

Et nous traversons des déserts de roche et de terres. Tout est sec, marron et ocre. Les villes abritent de superbes mosquées et des palaces aux céramiques colorées. Un vrai décor de mille et une nuits. J'arrive finalement aux ruines de Persépolis, l'ancienne capitale du grand empire perse ! A Téhéran, les mentalités sont plus ouvertes et je passe presque inaperçue.

Mes derniers jours au Kurdistan (une région dans l'ouest de l'Iran) me réconcilient avec le pays. Ici l'ambiance est plus détendue, les paysages sont montagneux et verts, l'air est pur, les rires sonnent sincères. Les kurdes me parlent des persécutions du gouvernement iranien et des indépendantistes. Les hommes arborent les traditionnels pantalons bouffants.

Je continue de tendre la main en bord de route (pas le pouce, car ici c'est une insulte) et j'arrive à la frontière de la Turquie. Mon tour du monde en auto-stop se poursuit sur la route de la Soie.

Photographies D'Iran

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